Au fil des dernières décennies, les avancées de la digitalisation ont modifié la communication en langage écrit. Les personnes aveugles et atteintes d’une malvoyance sévère disposent aujourd’hui de technologies leur facilitant toujours plus l’accès à l’information et à une plus grande autonomie. C’est dans ce contexte que l’étude « Avenir de l’écriture braille » (ZuBra) s’est intéressée à l’utilisation et à l’importance de l’écriture braille ainsi qu’aux technologies d’accès. Elle a été réalisée entre 2015 et 2018 par la Haute école intercantonale de pédagogie curative Zurich (HfH) et la haute école pédagogique de Heidelberg. Le présent article en résume quelques résultats choisis.

Par Fabian Winter et Ursula Hofer, HfH, et Markus Lang, HEP Heidelberg

L‘étude « Avenir de l’écriture braille » (ZuBra) a analysé le comportement des utilisatrices et utilisateurs, les facteurs d’influence ainsi que les compétences de lecture, d’écriture et d’écoute des utilisatrices et utilisateurs du braille à travers une enquête en plusieurs étapes. Une première étape consistait en sondages en ligne et hors ligne auprès de 819 utilisatrices et utilisateurs de tous âges. Entre 2016 et 2017, les évaluations se sont concentrées sur les compétences en langage écrit de 190 utilisatrices et utilisateurs du braille âgés entre 11 et 22 ans. Et enfin, en 2018, plusieurs entretiens avec des groupes de travail composés d’expertes et d’experts ont été consacrés à l’écriture braille en Allemagne, Autriche et Suisse.
L’étude a permis plus de 20 publications scientifiques. Les personnes intéressées trouveront de plus amples informations sur le site du projet de la HfH (www.hfh.ch/projekt/zukunft-derbrailleschrift-zubra, en allemand seulement).

Ecriture braille : vivante et viable
Les résultats de la première enquête ZuBra confirment l’importance de l’écriture braille pour les personnes déficientes visuelles, tous âges confondus. Même si les technologies auditives jouent un rôle prépondérant dans tous les groupes d’âge tant pour l’accès à la communication écrite que pour sa production, les données récoltées ne révèlent pas de tendance à la disparition de l’écriture braille. La plupart du temps, celle-ci s’utilise en combinaison avec les technologies informatiques, y compris la synthèse vocale (Hofer et al., 2016, 2021).

Début et durée de la promotion du braille
La deuxième enquête ZuBra atteste le lien évident entre la fluidité de lecture et la durée de l’utilisation du braille : plus le braille est utilisé longtemps, plus la fluidité de lecture augmente. Cet effet est particulièrement marqué chez les lecteurs qui recourent aussi bien au braille qu’à l’écriture noire. Ce résultat souligne l’importance de l’acquisition précoce de l’écriture braille. En même temps, l’apprentissage du braille doit être possible à n’importe quel moment de la vie (Winter et al., 2019).

Lire ou écouter ? Les deux !
La deuxième phase du projet montre que l’écoute permet une réception des informations nettement plus rapide que la lecture haptique. La vitesse de lecture moyenne à l’aide d’une synthèse vocale est bien supérieure à celle de la lecture du braille. Toutefois, de grandes différences ont été constatées. Concernant la compréhension de textes par contre, les participantes et participants qui lisaient en braille s’en sortaient mieux que ceux qui écoutaient (Hofer et al., 2019). Conclusion : la lecture haptique reste essentielle pour la communication écrite parce qu’elle contribue à la compréhension et à la mémorisation de contenus. En même temps, la synthèse vocale a – malgré quelques lacunes de compréhension mineures – l’avantage d’aller plus vite si bien que son utilisation complémentaire ciblée peut s’avérer judicieuse quels que soient la tâche et le domaine concernés.

Ecriture braille abrégée au fil des générations
Les données de ces deux enquêtes indiquent des différences entre les générations dans l’utilisation du braille, en particulier de l’écriture abrégée. Alors qu’il est prouvé que l’écriture abrégée permet de lire plus vite, elle est utilisée beaucoup plus rarement par la génération des moins de 23 ans que par les générations plus âgées et ce en dépit de l’existence d’offres pour l’apprentissage de cette écriture. Ces différences générationnelles peuvent s’expliquer par les aspects suivants : utilisation accrue des technologies et outils digitaux chez les plus jeunes, durée insuffisante de l’encouragement à apprendre l’écriture abrégée ou manque de temps disponible des enseignantes, enseignants et multitude des objectifs préprogrammés. Il est parfois inévitable de prendre certaines décisions et de fixer des priorités susceptibles d’entraîner l’abandon de l’enseignement de l’écriture abrégée.

L’écriture braille dans le contexte de la formation intégrative et séparative
Lors de la deuxième phase du projet, les participants ont été interrogés au sujet de la qualité et de l’étendue de l’enseignement du braille et des technologies. Indépendamment du contexte scolaire, la satisfaction concernant les offres était grande. Toutefois, la satisfaction était meilleure en ce qui concerne leur étendue dans les écoles spécialisées. Ce résultat dénote des besoins plus importants en personnel et en temps dans des contextes intégratifs. Malgré ces évaluations divergentes, les tests de performance en lecture, écriture et compréhension auditive n’ont pas révélé de différences majeures entre les contextes scolaires (Lang et al., 2020).
La promotion des compétences en langage écrit n’est donc pas déterminée par le contexte scolaire, mais bien plus par les disponibilités en temps et en personnel. Afin de garantir des offres de formations de qualité et suffisamment personnalisées, les collaborations entre personnes chargées de l’enseignement et du conseil sont tout aussi importantes que leur savoir-faire didactique nécessaire à la transmission des compétences en langage écrit dans les divers systèmes d’écriture braille (Hofer et al., 2021b, 2021a).

Conclusion : l’avenir de l’écriture braille
Globalement, les résultats mettent en évidence que même à notre époque de digitalisation croissante, l’écriture braille ne perd pas de son importance, mais elle est utilisée différemment. Elle reste une composante incontournable d’une participation scolaire, professionnelle et journalière. Pour la maintenir et la perfectionner, des offres de formation ciblées, des enseignantes et enseignants d’écriture braille qualifiés et une association entre enseignement de braille et nouvelles technologies qui privilégie les compétences sont indispensables.

Littérature (en allemand seulement) :
Hofer, U., Lang, M., & Schweizer, M. (2016). Lesen und Schreiben mit Brailleschrift und assistiven Technologien: Ergebnisse aus dem Forschungsprojekt «ZuBra – Zukunft der Brailleschrift». blind-sehbehindert, 136(2), 100–115.

Hofer, U., Lang, M., & Winter, F. (2021a). Zukunft der Brailleschrift: Grundlegene Erkenntnisse und notwendige Schlussfolgerungen für die Praxis. Didaktische Fördervorschläge und Erläuterungen. blind-sehbehindert, 141(4), 338–352.

Hofer, U., Lang, M., & Winter, F. (2021b). Zukunft der Brailleschrift: Grundlegende Erkenntnisse und notwendige Schlussfolgerungen für die Praxis. ZuBra-Erkenntnisse in 12 praxisnahe Thesen. blind-sehbehindert, 141(3), 265–275.

Hofer, U., Lang, M., Winter, F., Schweizer, M., Hallenberger, A., & Laemers, F. (2019). Leseund Schreibkompetenzen von Braille-Lesenden: Forschungsergebnisse aus dem Projekt Zukunft der Brailleschrift. blind-sehbehindert, 139(1), 7–26.

Lang, M., Hofer, U., & Winter, F. (2020). Lese- und Schreibkompetenzen von Braillenutzerinnen und -nutzern in Allgemeinen Schulen und Schulen mit Förderschwerpunkt Sehen: Ergebnisse aus dem Forschungsprojekt «ZuBra» (Zukunft der Brailleschrift). Zeitschrift für Heilpädagogik, 71(6), 280–292.

Winter, F., Hofer, U., & Lang, M. (2019). Lese- und Schreibkompetenzen von Jugendlichen und jungen Erwachsenen mit dualer Schriftnutzung: Forschungsergebnisse aus dem Projekt Zukunft der Brailleschrift. blind-sehbehindert, 139(2), 92–108.