Durant les loisirs, le sport participe de l’inclusion

Tout a commencé lors d’un camp de sport d’hiver réunissant des jeunes avec ou sans handicap visuel. Avec pour devise « rendre possible l’impossible », Blindspot, organisation à but non lucratif, réalise aujourd’hui divers projets avec succès et passion. Elle entend inscrire dans la société une attitude inclusive.

Par Ann-Katrin Gässlein

Des enfants et adolescents avec et sans handicap participent à un camp d’été de Cooltour. Photo: Thomas Hiller, Blindspot

En couverture, des enfants et adolescents en tenue de sport, dans une salle de gym. Photo : Blindspot

« L’inclusion est un atout pour tous », explique Jonas Staub, directeur de Blindspot. « Si un jeune handicapé de la vue évolue uniquement au milieu de ses semblables, abrité du monde extérieur, il n’a guère de possibilités de continuer à se développer. Son entourage le ménage par égard, lui-même a peut-être peur d’être rejeté. Ainsi, il risque de vivre dans une bulle.»

L’inclusion : un atout pour tous

L’inclusion présuppose l’inversion de ce développement. Lorsque des enfants handicapés et non handicapés font ensemble tout simplement ce qui leur fait plaisir, ils constatent que bien plus de choses les lient qu’elles ne les séparent. « Les jeunes non handicapés qui participent aux activités de Blindspot depuis des années sont très décontractés entre eux. De même, ils traitent les jeunes avec handicap juste normalement, sans faire preuve d’une sollicitude particulière. Ils font des blagues et rigolent ensemble. » Tous bénéficient de la diversité au sein du groupe, qui renforce leurs compétences sociales».

Ce constat a abouti à la création de Blindspot, en 2005. Le premier projet, lancé par Jonas Staub (socio-pédagogue et directeur de Blindspot) avec quelques complices partageant son idéal, fut un camp de sport d’hiver pour personnes avec ou sans handicap visuel. Jusqu’à aujourd’hui, ces programmes d’hiver, qui se déroulent avant tout à Saas Fee, n’ont rien perdu de leur popularité. Ils comprennent un camp pour enfants, un autre pour adolescents et quatre week-ends consacrés aux sports d’hiver. Lors des camps, des guides sont présents – des professionnels des sports d’hiver qui ont suivi des formations additionnelles pour accompagner les personnes aveugles et malvoyantes dans ces activités. « Les guides doivent bien maîtriser le ski et le surf pour pouvoir se concentrer entièrement sur la personne qu’ils accompagnent», explique Jonas Staub. « Les guides servent avant tout d’yeux pour la personne aveugle et malvoyante, qui peut ainsi se consacrer pleinement à la pratique de son sport.» Pour tous ces projets, Blindspot s’associe à des sportifs professionnels, experts dans leur discipline et expérimentés aux plans méthodologique et didactique. Souvent, bien plus de possibilités qu’on ne le pense généralement sont réalisables – en fait, presque tout ce qui fait plaisir aux enfants et aux adolescents est possible.

 

Un an déjà après sa création, Blindspot élargissait son offre pour s’ouvrir également aux enfants et adolescents présentant d’autres handicaps. En 2009, en collaboration avec diverses organisations partenaires régionales et nationales issues des domaines de la jeunesse, de la culture, de la santé et de la société, Blindspot a lancé son projet d’été « Cooltour ». Chaque année, durant huit jours, environ 80 enfants et adolescents vivent des moments intenses : ils dorment à six sous tente, font la cuisine et mangent ensemble, et suivent des cours de boxe, de skate et de break dance. En ces occasions, ils constatent qu’handicapés ou non, bien plus de choses les rapprochent qu’elles ne les séparent. «J’ai appris que les personnes handicapées ont les mêmes occupations que les autres et que c’est le monde extérieur qui fait du handicap un problème », rapporte une participante non handicapée d’un Cooltour.

 

Au camp, les collaborateurs de Blindspot ainsi que de nombreux bénévoles s’activent : jeunes adultes en formation dans le domaine pédagogique, civilistes, etc. « C’est toujours des moments pleins d’émotions et d’enseignements pour nous tous », ajoute Jonas Staub, tout sourire. Bien des parents rapportent que leurs enfants reviennent stimulés et euphoriques de leurs vacances. « Marco participe chaque année à plusieurs camps, mais lorsqu’il revient de chez vous, il explose littéralement de dynamisme ! Il déborde d’idées, de confiance en lui et d’autonomie », confie une maman. En 2016, Cooltour s’est vu décerner le Prix Printemps. A l’occasion de la remise du prix, l’organisation a également reçu le prix des spectateurs.

 

Conseil auprès des écoles et des institutions

 

Entre-temps, les tâches de Blindspot se sont diversifiées. Outre ses activités de loisirs, l’organisation poursuit un projet intitulé : « Inklusion macht Schule » (L’inclusion fait école). L’idée consiste à réunir les organisations de personnes avec ou sans handicap poursuivant des objectifs identiques ou similaires afin de promouvoir leurs échanges. Concrètement, cela signifie par exemple que lors de l’évaluation d’une nouvelle place de jeux, les élèves handicapés devraient aussi être consultés. Autre exemple : une école ordinaire et une école spécialisée voisines pourraient être encouragées à organiser ensemble une journée sportive commune. «L’inclusion va bien au-delà d’une idée. Il s’agit d’une attitude que nous voudrions voir s’imposer au sein de notre société », affirme Jonas Staub.

 

L’organisation ne manque pas d’ambitions pour l’avenir. En 2016, elle a acheté une maison dans le quartier de la Länggasse, au centre de Berne, pour la transformer en un restaurant inclusif, le « Provisorium 46». Durant une période fixée au cas par cas, des jeunes adultes avec handicap ont l’occasion d’y acquérir des compétences pour se présenter sur le premier marché du travail. Outre sur les aptitudes spécialisées, l’accent est mis sur l’acquisition de compétences interpersonnelles et sur la dimension sociale, afin que l’inclusion englobe tous les aspects de la personne. Les participants au projet travaillent main dans la main avec des personnes du même âge sans handicap. Il est prévu de transformer la maison afin de la rendre d’abord sans barrières, puis d’y aménager des salles de réunion et de conférence au sous-sol, ainsi que des logements pour accueillir des personnes avec ou sans handicap aux étages supérieurs. Là encore, le but est de promouvoir l’autodétermination des personnes handicapées au sein de la société.

 

Renseignements complémentaires sur : www.blindspot.ch et www.provisorium46.ch