Pourquoi les personnes handicapées sont-elles si rarement présentes aux événements qu’il organise ? Voilà la question que s’est posée le collectif Dachstock de la Reitschule de Berne. Des étudiants en travail social de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale ont cherché les raisons de cette absence. Dans leur rapport, ils ont formulé des recommandations pour favoriser une vie nocturne plus inclusive.

Par Andrea Eschbach

De la lumière tamisée, un comptoir trop élevé ou juste une carte des boissons peu lisible : la vie nocturne est truffée de barrières pour les personnes en situation de handicap.La « vie nocturne sans barrières » préoccupe depuis longtemps le collectif Dachstock, qui fait partie du centre culturel de la Reitschule de Berne. En effet, jusqu’ici, les personnes handicapées ne profitaient guère, voire pas du tout, de son offre. Il n’en fallut pas plus pour envisager une stratégie nouvelle. Quatre étudiants en travail social de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (FHNW) furent donc mandatés, au cours du module d’atelier de projet de leur formation pratique, pour analyser la situation actuelle, puis proposer des actions en vue de l’améliorer. Six mois plus tard à peine, Salomé Cvirka, Léonie Haas, Florian Hasler et Joëlle Moser remettaient leur rapport. Quatre co-chercheurs présentant différents handicaps, dont l’un une forte déficience visuelle, ont apporté au projet leur expérience de personnes concernées.

Le collectif privilégie déjà une culture d’accueil à bas seuil. Pourtant, les étudiants ont conclu que le centre culturel recèle de nombreux obstacles. Certes, la salle proprement dite est accessible à tous les co-chercheurs en situation de handicap, mais les marches peu contrastées de l’escalier, très raide, constituent de véritables embûches pour les clients présentant une déficience visuelle, pour qui les obstacles ne s’arrêtent d’ailleurs pas à l’orientation dans l’espace. Le bar non plus n’est pas sans barrières. De même, de par la taille et la couleur des caractères choisis, la carte des boissons n’est pas lisible.

L’équipe de chercheurs montre ensuite au collectif, exemples à l’appui, qu’au Dachstock, une vie nocturne inclusive est bel et bien possible. Elle préconise notamment l’aménagement d’un comptoir plus bas pour les personnes en fauteuil roulant, des couleurs très contrastées afin de faciliter l’orientation dans l’espace ainsi que le marquage tactile des mains courantes. Or, il n’y a pas que dans l’espace que les barrières doivent être surmontées : « Elles sont avant tout dans la tête des gens », précise Salomé Cvirka. Avec ses complices, elle propose notamment que soient organisées des fêtes avec des interprètes en langue des signes ou une « Disability-Pride-Parade ». Pour porter plus loin l’inclusion, en particulier dans le domaine de la musique, elle suggère d’engager aussi des artistes en situation de handicap. « La sensibilisation passe par la rencontre. Elle seule permet d’éliminer les barrières sociales telles que la peur de côtoyer des personnes handicapées, les préjugés, les malentendus liés à la méconnaissance de ces domaines spécialisés, la pitié ou l’ignorance », conclut Salomé Cvirka.