La Suisse ratifi e la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées.

Le 15 avril 2014, la Suisse a ratifi é, à New York, la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées ( CDPH) qui est entrée en vigueur dans notre pays à la mi-mai.

par Caroline Hess-Klein

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La ratification à New York. Photo: UN

L’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la CDPH le 31 décembre 2013. Elle constitue le fruit d’une collaboration avec la société civile, notamment avec les personnes handicapées et les associations qui les représentent. Ces acteurs en ont d’ailleurs largement façonné le contenu. Ainsi, traitées désormais sur un pied d’égalité avec les autres, les personnes handicapées doivent pouvoir bénéfi cier d’une participation et d’une intégration pleines et effectives à la société. La CDPH a déjà été ratifi ée par 143 états, ainsi que par l’UE. La Suisse participe désormais également à ce mouvement. Après l’adoption de la Convention par l’Assemblée fédérale le 11 décembre 2013, le Conseil fédéral a signé l’instrument d’adhésion le 9 avril 2014. Le 15 avril s’est déroulée dans le quartier général de l’ONU à New York la cérémonie de ratifi cation en présence de Pierre Margot-Cattin, préside nt du Conseil Egalité Handicap, et du conseiller national Christian Lohr. C’est à la mi-mai que la CDPH est entrée en vigueur en Suisse.

Teneur de la convention
Il s’agit de reconnaître la nécessité de promouvoir et protéger les droits de l’homme de toutes les personnes handicapées. La Convention réagit contre le constat selon lequel les personnes handicapées continuent d’être exclues de nombreux domaines de la société. Très large, son champ d’application comprend notamment les domaines suivants: Accessibilité (art. 9): accès à l’environnement physique, aux transports, à l’information et à la communication, et aux autres équipements et services ouverts ou fournis au public. Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19): droit de vivre dans la société, avec la même liberté de choix que les autres personnes. Ce droit inclut notamment la possibilité pour les personnes handicapées de choisir leur lieu de résidence et où et avec qui elles vont vivre, et qu’elles ne soient pas obligées de vivre dans un milieu de vie particulier.
Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21): les personnes handicapées ont le droit de demander, recevoir et communiquer des informations et des idées, sur la base de l’égalité avec les autres. Les États parties prennent toutes mesures appropriées. Ils communiquent, par exemple, les informations destinées au grand public aux personnes handicapées, sans tarder et sans frais supplémentaires, sous des formes accessibles et au moyen de technologies adaptées aux différents types de handicap. Education (art. 24): Les Etats parties reconnaissent aux personnes handicapées le droit à l’éducation. Leur système éducatif pourvoit à l’insertion scolaire à tous les niveaux et offre, tout au long de
la vie, des possibilités d’éducation.
Travail et emploi (art. 27): Les Etats parties reconnaissent aux personnes handicapées, sur la base de l’égalité avec les autres, le droit au travail. A cette fin, ils mettent en oeuvre des politiques et mesures appropriées pour interdire la discrimination fondée sur le handicap dans tout ce qui a trait à l’emploi sous toutes ses formes, notamment les conditions de recrutement, d’embauche et d’emploi, le maintien dans l’emploi, l’avancement et les conditions de sécurité et d’hygiène au travail.

Implications pour la Suisse
tactuel_02_Schwerpunkt_BRK_BriefmarkenEn ratifiant la Convention, la Suisse s’est engagée à garantir les droits stipulés par la CDPH et à les promouvoir. Aussi lui incombera-t-il d’examiner systématiquement dans quels domaines des actions s’imposent et de prendre les mesures nécessaires. La question des rapports de travail privés sera particulièrement sensible. En effet, en droit suisse, la protection contre toute discrimination est limitée dans ce domaine. Il s’agira également de considérer de très près les aspects relatifs aux services proposés par des entités privées, à la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12 de la CDPH), à l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société (art. 19 de la CDPH), ainsi qu’à la formation. Par son action, la CDPH tendra à compléter la législation suisse sur les handicapés. Elle contribuera à éliminer les nombreuses barrières présentes dans tous les domaines de la vie, qui continuent à entraver fortement l’autonomie de vie. La Convention devrait également apporter des améliorations au plan institutionnel: elle va
contraindre la Confédération comme les cantons à optimiser leurs structures – actuellement très rudimentaires – en matière de droit d’égalité pour les personnes handicapées. Il s’agira de créer des points de contact ainsi qu’un dispositif de coordination chargés de veiller à ce que les législations spécifiques adoptées n’enfreignent pas le droit à l’égalité des handicapés.

Application et suivi de la mise en oeuvre de la Convention
La CDPH de l’ONU stipule que les Etats parties veillent à appliquer la présente Convention. Ce mécanisme de suivi est créé à plusieurs niveaux. Selon l’art. 33, al. 2, de la CDPH, la Suisse est tenue de constituer un dispositif de promotion, de protection et de suivi de l’application de la présente Convention. Actuellement, cet instrument n’existe qu’à l’état embryonnaire, sous la forme d’un projet pilote, à savoir, le Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH). Dans l’article 33, al. 3, de la CDPH, la société civile – en particulier les personnes handicapées et les organisations qui les représentent – est expressément mentionnée. Elle doit participer pleinement à la fonction de suivi. En Suisse, la Conférence des organisations faîtières de l’aide privée aux personnes handicapées (DOK) a décidé, fin avril, d’assumer ce rôle de coordination. Actuellement, elle est en passe de définir les tâches qui lui incomberont dans ce contexte. Enfin, l’application et le suivi de la CDPH de l’ONU doivent également être assurés à l’échelle de l’Organisation des Nations Unies. A cette fin, le Comité des droits des personnes handicapées (art. 34) est chargé d’examiner  les rapports soumis par les Etats parties et qui attestent des mesures nationales prises pour appliquer la CDPH. Chaque année, lors de la Conférence des États parties (cf. art. 40 de la CDPH), les représentants de ces derniers et ceux de la société civile se réunissent pour traiter toute question liée à la présente Convention.

Caroline Hess-Klein est directrice du centre Egalité Handicap